Résilience active et organisationnelle : pourquoi l'une ne va pas sans l'autre

Résilience active et organisationnelle : pourquoi l'une ne va pas sans l'autre

© Maxime Rabéchault

Résilience active et organisationnelle : pourquoi l'une ne va pas sans l'autre

© Maxime Rabéchault

Résilience active et organisationnelle : pourquoi l'une ne va pas sans l'autre

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Plans de continuité, matrices de risques, ateliers sur le changement — tout un arsenal déployé comme si l'organisation était un bunker à renforcer contre les tempêtes. Sauf que les bunkers ne pensent pas. Ils ne doutent pas. Et ils ne prennent pas de décisions à 3h du matin quand tout bascule. La résilience organisationnelle n'est pas une question d'infrastructure. C'est une question de système nerveux. Et dans toute organisation, le système nerveux porte un costume.

Résilience active, résilience organisationnelle : pourquoi l'une ne va pas sans l'autre

Les entreprises parlent beaucoup de résilience. Plans de continuité, matrices de risques, ateliers sur le changement — tout un arsenal déployé comme si l'organisation était un bunker à renforcer contre les tempêtes.

Sauf que les bunkers ne pensent pas. Ils ne doutent pas. Et ils ne prennent pas de décisions à 3h du matin quand tout bascule.

La résilience organisationnelle n'est pas une question d'infrastructure. C'est une question de système nerveux. Et dans toute organisation, le système nerveux porte un costume.


Ce qu'on rate quand on parle uniquement de résilience organisationnelle

La littérature académique a produit des définitions solides. Lengnick-Hall parle de « capacité à absorber et s'adapter face à l'adversité ». Vogus et Sutcliffe définissent ça comme « le maintien d'un ajustement positif dans des conditions difficiles ». Mallak identifie quatre facteurs : croyance active, gestion des ressources contextuelles, développement des relations, réflexion active.

Tout ça est vrai. Et structurellement incomplet.

Parce qu'en pratique, trois illusions persistent :

Illusion n°1 : La résilience, c'est un plan de continuité

Un PCA vous permet de redémarrer vos serveurs après une panne. Il ne vous dit pas comment décider quand les données sont contradictoires, les équipes divisées, et le conseil d'administration en panique. La résilience commence exactement là où les procédures s'arrêtent.

Illusion n°2 : La résilience, c'est revenir à la normale

Non. Comme le montre Hollnagel dans ses travaux sur le Resilience Engineering, la résilience ne consiste pas à restaurer un état antérieur. C'est ajuster son fonctionnement avant, pendant, après les événements pour maintenir les opérations critiques. Les organisations résilientes ne restaurent pas. Elles transforment. Le « retour à la normale » est une nostalgie, pas une stratégie.

Illusion n°3 : La résilience, c'est l'affaire des RH

Les directions adorent externaliser la résilience. On forme les managers de proximité à « tenir le choc », on équipe les collaborateurs d'outils de bien-être, on crée des cellules de crise. Pendant ce temps, au comité de direction, on navigue à l'instinct entre egos surdimensionnés et angles morts cognitifs. Comme si la résilience pouvait être déléguée vers le bas pendant que le sommet reste fragile.


Le trou dans la raquette : le facteur humain au sommet

Les chiffres sont têtus. Selon McKinsey, 70% des transformations échouent. Dans 60% des cas, c'est le facteur humain. Pas la tech. Pas la stratégie. Les humains qui décident.

Le paradoxe des comités de direction : ils concentrent à la fois le pouvoir décisionnel et les vulnérabilités comportementales les plus lourdes. Biais de confirmation, pensée de groupe, surinvestissement émotionnel, incapacité à capter les signaux faibles. Toutes ces failles s'amplifient sous pression et fatigue décisionnelle.

Exemple concret. Une scale-up tech en forte croissance. Le fondateur charismatique incarne la vision, la culture, l'énergie. Puis il part. Pas de conflit, pas de scandale. Juste un départ programmé. Sauf que personne dans l'équipe dirigeante n'a développé cette capacité à porter la direction dans l'ambiguïté. Résultat : six mois de flottement stratégique, perte de confiance des investisseurs, démissions en cascade.

L'organisation avait des process impeccables. Elle n'avait pas de résilience au sommet.

La résilience organisationnelle ne se délègue pas. Elle s'incarne ou elle n'existe pas.


Résilience active : la métacompétence qu'on ne voit jamais

On définit la résilience active comme la capacité à encaisser, rebondir, apprendre et décider dans l'incertitude. Ce n'est pas une posture. Ce n'est pas du storytelling motivationnel. C'est une métacompétence — un substrat cognitif et comportemental qui conditionne toutes les autres.

Pourquoi « métacompétence » ? Parce que la résilience active n'est pas une compétence parmi d'autres. C'est ce qui permet aux autres compétences de s'exprimer sous pression. Un leader peut avoir une vision stratégique brillante, une expertise sectorielle pointue, des qualités relationnelles remarquables. Mais si sa capacité de résilience active est faible, tout ça se dégrade ou disparaît dès que le contexte devient hostile.

La résilience active est au leadership ce que le système d'exploitation est à l'ordinateur : invisible en temps normal, critique en toutes circonstances. Elle détermine :

  • La qualité décisionnelle sous contrainte (maintenir un niveau de discernement élevé malgré la fatigue, l'ambiguïté, la pression temporelle)

  • La performance relationnelle dans la tension (préserver la qualité des interactions même en désaccord profond)

  • L'équilibre entre engagement et préservation (maintenir l'intensité sans basculer dans l'épuisement — ce que Hollnagel nomme le Thoroughness-Efficiency Trade-Off)

  • L'apprentissage en temps réel (extraire des insights stratégiques de l'adversité pendant qu'elle se déroule)

Contrairement à la résilience réactive — « tenir le coup en attendant que ça passe » — la résilience active transforme l'adversité en feedback stratégique. Elle s'inscrit dans la lignée du Resilience Engineering de Hollnagel : répondre (gérer ce qui arrive), surveiller (savoir ce qui se passe), anticiper (prévoir ce qui pourrait arriver), apprendre (tirer les leçons). Mais là où Hollnagel pense systèmes, on pense leaders.

La résilience active intègre les quatre facteurs de Mallak :

  • Croyance active : maintenir une hypothèse directionnelle même avec des données incomplètes, sans tomber dans le biais de confirmation

  • Gestion des ressources contextuelles : mobiliser l'intelligence collective sans se noyer dans le consensus

  • Développement des relations : préserver la qualité des liens décisionnels dans la tension

  • Réflexion active : apprendre en temps réel, ajuster sans basculer dans la réactivité pure

C'est une boucle cognitive courte : percevoir, analyser, décider, ajuster. Recommencer. Les leaders résilients ne sont pas ceux qui ne doutent jamais. Ce sont ceux qui doutent efficacement. Ils pratiquent ce que Weick appelle la mindfulness — cette attention continue qui détecte les signaux faibles avant qu'ils ne deviennent des crises majeures.

En positionnant la résilience active comme métacompétence, on sort du paradigme classique du leadership development qui traite les compétences en silos. La résilience active est le multiplicateur transversal qui détermine si ces compétences restent accessibles quand elles sont le plus nécessaires — c'est-à-dire exactement quand tout va mal.


L'interdépendance invisible : pas de collectif résilient sans individus lucides

Voici ce qu'on ne dit pas assez : il n'existe pas de résilience collective sans un socle d'individus capables de garder leur clarté d'analyse sous pression.

Weick et Sutcliffe l'ont documenté dans leurs travaux sur les High Reliability Organizations. Ils appellent ça le mindful organizing — une forme d'organisation collective qui détecte et corrige les événements inattendus avant l'escalade. Cinq processus interdépendants : préoccupation pour l'échec, réticence à simplifier, sensibilité aux opérations, engagement envers la résilience, déférence envers l'expertise. Ces cinq dimensions créent la collective mindfulness — un état d'attention partagée qui anticipe les vulnérabilités avant qu'elles ne s'accumulent.

Le point crucial : ces processus ne peuvent exister que si les individus qui composent l'organisation — surtout ses leaders — sont capables d'opérer dans ce mode cognitif exigeant.

Une organisation est un système nerveux étendu. Chaque décideur est un nœud de ce réseau. Dans tout système nerveux, un signal faible ignoré devient une défaillance systémique. Quand un membre du comex nie un risque par biais d'optimisme, ce n'est pas « son » problème. C'est un angle mort collectif. Quand un dirigeant prend des décisions sous fatigue cognitive chronique, ce n'est pas de la résilience. C'est de l'usure qui se transmet.

La résilience collective émerge quand les individus clés sont capables de :

  • Garder leur clarté d'analyse (distinguer signal et bruit, même dans le chaos)

  • Reconnaître leurs biais (savoir quand leur cerveau les trahit)

  • Coopérer dans la tension (maintenir la qualité relationnelle en désaccord profond)

  • Incarner la direction (porter une vision stratégique même quand elle n'est pas encore parfaitement claire)

Diane Coutu identifie trois piliers de la résilience psychologique : acceptation lucide de la réalité, capacité à donner du sens, aptitude à improviser. Ces trois dimensions ne sont pas des traits de personnalité figés. Ce sont des compétences cognitives et émotionnelles qui se développent. Mais elles doivent être présentes au sommet pour irriguer le reste.

Sans ça, l'organisation peut avoir les meilleurs process du monde. Elle reste vulnérable. Parce qu'au moment critique, ce sont des humains qui décident. Et si ces humains sont en mode survie cognitive, l'organisation suit.


UNREST : reconnecter les deux strates

C'est là qu'intervient UNREST. Pas comme un énième outil de coaching, mais comme un jumeau numérique cognitif et comportemental qui opère au niveau de la métacompétence — là où se joue réellement la performance décisionnelle sous pression.

Le principe : mesurer, nourrir et suivre la résilience active des leaders à travers une boucle de feedback cognitive continue. Parce que si la résilience active est une métacompétence qui conditionne toutes les autres, alors son développement ne peut pas suivre les méthodes classiques du leadership training. On ne développe pas une métacompétence avec des séminaires ponctuels.

Concrètement, UNREST agit sur quatre leviers :

  • Cartographie des biais cognitifs
    Identifier les angles morts avant qu'ils ne deviennent des erreurs stratégiques. Cette « préoccupation pour l'échec » que Weick et Sutcliffe placent au cœur du mindful organizing.

  • Dynamiques de tension
    Suivre l'évolution de la fatigue décisionnelle et des zones de friction. Mesurer en temps réel l'état du « système d'exploitation » du leader.

  • KPIs comportementaux
    Transformer des signaux subjectifs (« je sens que ça ne va pas ») en indicateurs avancés de résilience organisationnelle. Faire de la métacompétence individuelle un proxy prédictif de la performance collective.

  • Simulation de scénarios
    Entraîner la prise de décision dans l'ambiguïté, sans attendre la prochaine crise. Développer le muscle de la résilience active par la pratique délibérée.

Le Twin ne remplace pas le leader. Il l'augmente au niveau de sa métacompétence. Il crée une transformation silencieuse : pas de grandes annonces, pas de séminaires spectaculaires. Juste une montée progressive en capacité décisionnelle, mesurée et objectivée.

Et c'est là que la boucle se referme : en renforçant la résilience active des individus — cette métacompétence qui conditionne leadership, décision et bien-être — UNREST nourrit directement la résilience organisationnelle. Parce qu'une organisation n'est jamais plus forte que la qualité de la métacompétence de ses leaders sous pression.

La résilience active n'est pas une soft skill de plus. C'est la hard skill qui détermine si toutes les autres restent opérationnelles quand ça compte.

Système nerveux actif, pas armature rigide

Les organisations ne sont pas des bunkers. Ce sont des organismes vivants. Et dans tout organisme, la résilience vient d'un système nerveux actif — pas d'une armature rigide qui finit par craquer au premier coup inattendu.

La résilience organisationnelle ne se construit pas avec des procédures. Elle se cultive à la source : dans la tête, le cœur et les réflexes de ceux qui décident. UNREST propose de nourrir ce système nerveux de manière méthodique, mesurable, sans folklore ni grand-messe du changement.

La question n'est pas : « Votre organisation est-elle résiliente ? »

La vraie question : « Vos leaders le sont-ils ? »

Maxime Rabéchault

Maxime Rabéchault